4 décembre 2004

Lettre ouverte à Nicolas Sarkozy

Cher Monsieur,

Vous voici à la tête du principal parti politique de France. Félicitations !

Quoi qu’en disent Madame la Ministre de la Défense et Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale, et bien que vous deviez très diplomatiquement ne pas vous prononcer encore, vous serez probablement le candidat de l’UMP aux présidentielles de 2007. Pour beaucoup de nos compatriotes, c’est une très bonne nouvelle. Comme j’ai pu le constater lors de mes vacances en France cet été, vous représentez l’espoir. En vous voyant agir et en vous écoutant, ils pensent : « l’immobilisme et le déclin ne sont pas inéluctables » ; « la relève à droite est en marche » ; « nous aurons bientôt une vraie stratégie pour réussir le passage au 21eme siècle ».

J’aimerais le croire moi aussi. Vos déclarations récentes me laissent penser que vous analysez la situation avec lucidité, que les sujets tabous ne vous font pas peur. Vous avez un talent indéniable pour la communication. Il me semble que vous saurez, mieux que quiconque, vendre aux Français les décisions difficiles, trop longtemps retardées, qu’il faudra bien prendre un jour. A l’heure où j’imagine que vous vous attelez avec votre équipe à définir une stratégie pour sortir le pays de l’impasse, permettez que je vous fasse part de quelques réflexions. Elles sont issues du regard contrasté que je porte sur la situation française depuis bientôt 6 ans que je vis aux Etats-Unis. Puissent ces idées contribuer à votre propre réflexion.

Faire rentrer la France dans le 21eme siècle.

Vous avez évoqué le 28 Novembre dernier la nécessité de remettre la France au travail. C’est clairement la priorité. Comme beaucoup de Français, je suis déçu au point d’être en colère contre Messieurs Chirac et Raffarin. Je ne comprends pas qu’ils n’aient pas profité de la victoire de 2002 pour défaire les erreurs, que dis-je, les sabotages socialistes, 35 heures en tête. En gouvernant au centre, en adoptant les thèses de l’extrême gauche alter-mondialiste, en cédant trop facilement aux menaces des syndicats révolutionnaires, en n’engageant pas résolument la France sur la voie de la réforme libérale, ils n’ont fait que retarder l’inévitable, tout en plongeant une grande partie de leur électorat dans le désarroi le plus complet. Les résultats des deux derniers scrutins indiquent clairement que Jacques Chirac n’a pas su interpréter le message du 21 Avril 2002. Votre défi, à la tête de l’UMP, sera d’éviter une défaite retentissante pour la droite en 2007.

Pour sortir la France de la spirale du déclin, il faudra dès le lendemain des élections prendre des mesures énergiques, effectuer des changements radicaux. Les demi-mesures et mini-réformes en cours ne peuvent produire l’électrochoc nécessaire pour libérer les énergies, susciter de nouvelles entreprises, convaincre les entreprises étrangères d’investir en France et arrêter l’hémorragie des cerveaux. Pour remettre le pays sur la voie du renouveau, il faudra simplifier de nombreux aspects de l’activité économique et sociale, détruire les barrières administratives, réduire drastiquement la fiscalité. Et réduire plus drastiquement encore les dépenses publiques pour résorber les déficits et la dette accumulés ces trente dernières années. En recentrant l’Etat sur ses fonctions régaliennes, on re-orientera l’investissement national vers le secteur privé, seul créateur d’emplois et de richesses à long terme. L’objectif principal du gouvernement devra être de redonner l’initiative aux Français, de créer les conditions qui les conduiront à investir, à innover, à se battre et à gagner. En résumé, il faudra libérer l’économie. La notion de libération n’est pas excessive. Peu importe que l’intelligentsia de gauche ait réussit à diaboliser l’idée libérale, ce dont la France a le plus besoin en ce moment, c’est bien de liberté. Il faut libérer la France de l’étatisme qui l’étouffe progressivement depuis les années 70. Cela ne se fera pas sans douloureuses remises en cause.

Vu de l’étranger, il est frappant de voir à quel point les Français semblent se replier sur eux-mêmes, se recroqueviller sur leurs avantages acquis, sans voir qu’ils vivent déjà au dessus de leurs moyens. Dans presque tous les discours, on dénote une dose de fatalité, de résignation. La France semble figée dans une attitude schizophrénique, partagée entre la certitude de sa grandeur universelle et le constat navré de son dynamisme et de sa compétitivité diminués. Chez certains, cette attitude se mue en aveuglement total. Comment expliquer le dénigrement systématique des solutions libérales adoptées ailleurs, malgré leur efficacité indéniable ? Le status quo est devenu la norme française. Ce qui me frappe le plus, par rapport à l’Amérique, ce n’est pas tant l’immobilisme ou le manque de réalisme pragmatique, mais le manque d’espoir, une certaine forme de désespérance. La France me fait l’effet d’une vieille dame déprimée qui refuse de voir son mal et, par conséquent, de se soigner.

Or, le mal qui la ronge est mortel. Les causes en sont multiples, mais l’une d’entre elles me parait particulièrement préoccupante : les Français vieillissent. Depuis de nombreuses années, la situation démographique de notre pays est alarmante. Le fait que certains de nos voisins européens soient dans une situation plus catastrophique encore ne doit pas nous rassurer. Le non-renouvellement des générations est une épée de Damoclès qui pèse sur notre avenir. Alors que l’impact du vieillissement de la population sur notre système de protection sociale et le dynamisme de notre économie est évident, les gouvernements de ces dernières années se sont résignés à ne rien faire. Or, la dénatalité n’est pas une fatalité. Il suffit de prendre le taureau par les cornes. Des mesures fiscales simples inciteront les familles françaises à faire plus d’enfants.

Il y a un autre mal profond qui mine notre veille France : la dilution de son identité, en raison de son évolution multiculturelle et multiconfessionnelle. Bien que voulue pendant les trente glorieuses, l’immigration aurait du être strictement contrôlée depuis le premier choc pétrolier. En particulier en provenance des pays musulmans. Bien entendu, il faut intégrer les Français de confession musulmane, ce que vous avez essayé de faire au Ministère de l’Intérieur. Beaucoup reste à faire pour que tous les immigrants adoptent notre langue et notre culture avant même d’accéder à la nationalité. Contenir l’activisme prosélyte à tendance islamiste de pays comme l’Arabie Saoudite est une question de sécurité nationale. Mais l’urgence des urgences dans ce domaine, c’est bien de stopper l’immigration clandestine. Le dogme de la tradition de terre d’accueil doit être revisité. Les criminels étrangers doivent être renvoyés chez eux. La pratique du regroupement familial doit être abolie. Et il faut établir un régime de quotas par pays, pratique très répandue et tout à fait compatible avec les droits de l’homme, quoiqu’en dise les extrémistes de gauche.

Chômage. Dénatalité. Immigration. Insécurité. On peut, sans exagérer, affirmer que les Français ont peur de l’avenir. Pour leur redonner confiance, il faut d’abord arrêter d’essayer de leur faire croire que tout va bien. La première étape de toute rémission, c’est la prise de conscience. De nombreux auteurs ont, ces dernières années, mis en évidence les symptômes du déclin français. Certains ont fait des propositions concrètes. On les a accusés de défaitisme, quasiment de trahison. Ecoutez-les, mettez-les à contribution pour définir la stratégie qui permettra de remettre la France sur les rails. Au-delà des intellectuels, ce sont les Français qu’il faut interpeller et mettre à contribution, bien avant la présidentielle ou que le moment soit venu de mettre en œuvre cette même stratégie.

Les Français ne sont pas des bœufs, pour peu qu’on sache les responsabiliser. C’est en le faisant que vous pourrez le mieux vous différencier de vos prédécesseurs ou concurrents, consolider votre capital de sympathie auprès des Français et diriger in fine la transformation du pays. C’est en mettant en pratique une nouvelle conception du rôle du politique, fondée sur le respect des gens, une certaine humilité, la notion de service, et une intégrité sans faille que vous obtiendrez la participation active des Français au processus démocratique, puis aux diverses étapes du changement qui doit s’effectuer dans le pays. Le travail de réflexion publique sur les défis et les solutions à mettre en place suppose bien entendu une liberté totale de pensée et de parole. Si l’UMP ne s’autorise pas à porter un regard critique sur l’action, voire l’inaction, du gouvernement, c’est droit dans le mur que nous irons, et pas seulement aux élections de 2007.

Nous pouvons, ensemble, sortir de l’impasse actuelle. La fierté du coq gaulois, réputée de ce coté-ci de l’Atlantique (au point d’être qualifiée d’arrogance), est un puissant ressort à utiliser, une fois le constat sans complaisance établit de la situation réelle du pays. C’est une véritable révolution culturelle qu’il faut encourager, dans notre camp et au-delà des clivages politiques traditionnels. Le monde complexe dans lequel nous évoluons laisse les Français perplexes. L’évolution rapide des technologies, des idées et des mœurs a atténué les points de repères habituels. Bien que nous vivions dans l’ère de l’information, les gens ne comprennent plus très bien le monde dans lequel ils vivent. La violence est omniprésente, la consommation devient le critère par lequel se définit l’individu. L’émotion prend le pas sur la raison, y compris sur la place publique. Le nihilisme fait des ravages, et pas seulement dans les esprits jeunes. Certaines évolutions dans les comportements sociaux, notamment sur le plan sexuel, bouleversent les fondements même de la société. En cette période de confusion et d’incertitudes, les Français ont plus que jamais besoin de sens.

Les hommes et les mouvements politiques n’échappent pas aux conséquences de la déliquescence des repères moraux et philosophiques, à la perte de sens qui s’est installée dans la société depuis 68. Il n’y a qu’à voir la façon dont l’Assemblée vote sur les questions de société, sans parler de la vacuité de certains propos tenus par des responsables politiques de tous bords. La révolution culturelle dont je parlais doit s’appuyer sur un retour aux valeurs. Il faut que la France millénaire se réconcilie avec elle-même, fasse le bilan de ses forces et de ses faiblesses à l’aube du 21eme siècle, et l’inventaire de ce qui la définit, malgré et au-delà des égarements qui parsèment son histoire. C’est en grande partie le rôle des intellectuels. Cependant, il me semble important pour un mouvement politique de clarifier les valeurs dans laquelle s’ancre sa réflexion et ses propositions d’action. Il serait opportun à mon sens que l’UMP mène une réflexion de fond sur les fondations morales qui sont ou doivent être les siennes. Les valeurs de liberté, d’initiative, de responsabilité, de respect, de dialogue créatif, d’innovation, sont probablement partagées par la majorité des Français susceptibles de voter à droite. Partant de là, quelle position votre formation doit-elle adopter sur les questions sociétales d’actualité, comme celles liées à l’institution du mariage (divorce, homosexualité), ou à la protection de la vie (recherche sur l’embryon, avortement, euthanasie) ?

Les valeurs ont joué un rôle majeur dans la re-élection de George Bush. Il est peut être temps en France de créer un parti conservateur, au sens américain du terme, qui prenne a cœur les préoccupations morales de la majorité silencieuse des Français et propose une alternative clairement libérale, au sens français du terme, pour rompre définitivement avec le socialisme dans ce pays. Vous avez évoqué récemment le rôle de la religion dans la vie publique. J’applaudis. Je rêve d’entendre un jour un homme politique français, candidat ou élu à la magistrature suprême, prier Dieu de bénir la France, comme c’est le cas fréquemment aux Etats-Unis. Pourquoi pas ?

Mieux faire l’Europe.

L’avenir de la France passe par l’Europe. Tout le monde s’accorde sur ce point, même à gauche. Or, le défi principal qui se présente à notre génération est de sortir l’Europe de l’impasse bureaucratique. La marche forcée vers l’intégration s’est faite à Bruxelles, au mépris de l’opinion des peuples européens. Certes, les traités de Maastricht et Nice ont pu être ratifiés techniquement par les parlements nationaux, mais les peuples n’ont pas été consultés sur les grandes orientations. Certes, un grand nombre des décisions prises par les commissaires européens, notamment sur le plan économique, sont d’inspiration libérale et vont plutôt dans le bon sens. Mais, les élus européens n’ayant aucun pouvoir réel, le gouvernement effectif de l’Europe est laissé à des fonctionnaires. Cette réalité est très loin de correspondre à l’idée démocratique sur laquelle nos sociétés sont fondées.

Nous n’avons pas d’autre choix que de réussir l’Europe. Et parce que c’est le cas, il faut prendre le temps de revoir les objectifs de la construction européenne et de revisiter ses modalités de fonctionnement. Pourquoi faisons-nous l’Europe ? Pour faire concurrence et nous opposer à « l’hyperpuissance » américaine ? Ou pour essayer d’obtenir pour nous-mêmes les bénéfices dont jouissent les Américains ? Quelle Europe veut-on faire ? Veut-on d’un super-Etat bureaucratique et centralisé qui régisse les moindres aspects de la vie des Européens ? Ou bien s’agit-il de créer un espace de liberté, de croissance et de synergies dans le contexte de valeurs partagées ? L’Europe, pas plus que la France, n’a besoin de plus d’Etat… La croissance, par contre, serait la bienvenue ! Aux vues des différences qui existent entre les Etats et les peuples européens, quel est le meilleur mode d’organisation au sein de la Communauté ? Est-ce la recherche du consensus général, finalement sanctionné par le vote majoritaire, inévitable source de frustrations ? Ne peut-on plutôt s’orienter vers un fonctionnement plus souple, basé sur le partenariat volontaire entre Etats-membres ? L’actuelle proposition de Constitution Européenne répond clairement à ces questions, mais ses réponses ne sont pas les bonnes. Entériner cette constitution serait condamner l’Europe à l’impuissance, à l’immobilisme, au déclin prolongé.

Je crois qu’il serait sain d’évaluer stratégiquement et librement cette proposition de constitution avant de prendre des décisions qui engagent à long terme notre avenir collectif. L’opportunité se présente aujourd’hui de faire une Europe qui corresponde aux aspirations profondes et s’appuient sur les spécificités des peuples européens. Demain, il sera trop tard, revenir en arrière sera quasiment impossible. Prenons le temps de la réflexion, même si cela implique de remettre en cause le travail des élites européennes qui ont cogité ce projet. En particulier, ayons le courage de dénoncer l’idéologie qui sous-tend le concept d’intégration politique. Vouloir forcer les peuples européens à fusionner dans une sorte de grand magma uniforme aux contours imprécis est un objectif que je n’hésite pas à qualifier de marxiste. Rien ne le justifie, pas même les conflits passés. Ce rêve utopique est celui de bureaucrates et de politiciens complètement déconnectés de la réalité. Certains nostalgiques de l’idéologie socialiste sont en train d’essayer de nous imposer l’utopie qui vola en éclats avec la chute du mur de Berlin. Soyons réalistes et pragmatiques. Sachons dénoncer cette imposture idéologique et éviter une catastrophe historique. La réalité d’aujourd’hui c’est qu’il n’y a pas un peuple européen, mais des peuples européens.

Un peuple européen relativement uni, à l’image du peuple américain, émergera peut être à long terme, dans 50 ou 100 ans. Ce ne sera possible cependant que si nos actes fondateurs d’aujourd’hui s’appuient sur nos valeurs communes, dans le respect de nos différences. La question turque a le mérite de mettre à jour les intentions utopiques qui se cachent derrière la notion, officiellement si impérative, d’intégration politique. Si l’on intègre la Turquie dans l’Europe, pourquoi pas les pays musulmans situés au sud de l’Europe ? Le refus de nos représentants[1] de reconnaître les origines chrétiennes de la civilisation européenne, et partant la communauté de valeurs qui caractérise l’Europe dans son âme, est ressenti par beaucoup de nos compatriotes comme l’une des plus grandes trahisons de ces dernières années. Rien à voir avec la séparation de l’Eglise et de l’Etat, et la sacro-sainte laïcité dont se parent ceux qui préfèrent, par idéologie, nier la vérité historique et rejeter dans le même temps les valeurs de civilisation issues de cet héritage millénaire.

La crise irakienne a montré les difficultés très concrètes qu’il faudra surmonter pour réaliser l’Europe politique que la nouvelle constitution est supposée faciliter. Il faudra du temps, beaucoup de temps. Et plus qu’une constitution commune. L’idée d’une politique européenne de la défense a sérieusement du plomb dans l’aile aujourd’hui. Le gouffre qui existe entre la position du couple franco-allemand et celle l’Angleterre n’est pas près de se résorber, même si Tony Blair est évincé du pouvoir. Beaucoup dépend de l’attitude de la France d’après 2007. Tant que la France maintiendra son attitude d’opposition systématique aux Etats-Unis, il y a peu de chance que l’Europe soit capable de parler d’une seule voix dans le concert des nations. L’Allemagne, réaliste, a fini par prendre ses distances par rapport au “vedrinisme” de Monsieur de Villepin. Ceux des nouveaux membres de la Communauté Européenne qui ont vécu sous le joug soviétique savent ce qu’ils doivent à l’Amérique de Ronald Reagan. De plus, ils seraient mal avisés de choisir la relative impuissance militaire franco-allemande plutôt que d’adosser leur stratégie de défense sur la formidable machine américaine.

Il faut que la France cesse de baser sa politique étrangère sur le ressentiment et la jalousie vis-à-vis du succès américain. Il ne s’agit pas de s’aligner aveuglement sur la position américaine, qui peut être critiquable. Il s’agit d’user de mesure dans notre critique, en faisant preuve de réalisme, ce qui pourrait nous conduire a eu peu d’humilité. La France n’a plus ni la puissance économique, ni l’influence politique, ni les moyens militaires pour justifier le rôle de premier plan qu’elle prétend encore jouer sur la scène diplomatique internationale. Investissons et redressons la barre avant de donner des leçons aux autres. Il s’agit aussi de choisir clairement le camp de l’Occident dans la guerre mondiale contre le terrorisme islamique. Les Etats-Unis conduise cette guerre avec détermination. Ils font certes des erreurs de jugement, mais ils paient aussi le prix fort. Nous, Européens, bénéficierons de cet investissement à long terme, tout comme les pays de l’Est ont bénéficié de l’obstination de plusieurs générations d’Américains pendant la guerre froide. Nous sommes dans le même camp, ne l’oublions pas. Plutôt que de faire de l’obstruction au niveau de l’OTAN, ou de rêver d’une Défense Européenne que nous n’avons pas les moyens de mettre en place et qui ne sera vraisemblablement jamais capable d’atteindre l’efficacité de l’Alliance Atlantique, choisissons de travailler avec les Américains. Nous avons tout à y gagner. L’Europe et le monde ont tout à y gagner.

Le referendum sur la Constitution Européenne sera un moment historique, bien au-delà du contexte politique franco-français. C’est une question grave a laquelle nous devrons tous répondre l’an prochain : non pas « oui » ou « non » à l’Europe ; mais « oui » ou « non » à la formule négociée par nos représentants, en notre nom, au cours des deux dernières décennies. Ce sera aussi votre premier rendez-vous électoral à la tête de l’UMP. Le Président de la République et le gouvernement feront campagne pour le oui, dans la logique des engagements pris par eux-mêmes ou leurs prédécesseurs au fil des ans. Bien que tout le monde semble penser que vous abonderez dans ce sens, je me demande et je vous demande : quelle sera votre position ? Alignement sur la position présidentielle au nom de la sacro-sainte loyauté au chef de l’Etat, si souvent rappelée à votre bon souvenir récemment ? Ou courage d’appeler un chat un chat, au risque de rompre ouvertement avec Jacques Chirac deux ans avant l’échéance de 2007 ?

Décision difficile s’il en est. Mon conseil : exercez votre leadership. Dites la vérité aux Français sur ce qui les attend et sur l’incapacité de l’Europe qui nous est proposée de créer plus de liberté et de richesse, dans le respect de nos diversités. Ne cédez pas aux pressions de ceux qui ne savent que ramer dans le sens du courant, sans voir qu’à l’issue il a une cascade mortelle. Ne cédez pas non plus aux invectives de ceux qui veulent prendre notre vote en otage en nous prédisant une catastrophe insurmontable en cas de non-ratification. Utilisez votre capital de sympathie auprès des Français pour expliquer ce qui doit changer dans le processus européen et pourquoi il est utile de revenir à la table des négociations avec nos partenaires pour construire une Europe qui fonctionne. Certains de vos amis politiques vous maudiront sûrement, mais la France et les Français vous en seront reconnaissants.

En conclusion, il me semble que les grands axes d’une stratégie de redressement nationale, à mettre en œuvre à partir de 2007, sont :
  • Libérer l’économie,
  • Mettre en place une politique nataliste,
  • Contrôler l’immigration,
  • Mobiliser les français, les faire participer à la définition de votre projet,
  • Faciliter une révolution culturelle, centrée sur des valeurs claires,
  • Appeler à voter non au futur referendum sur la Constitution Européenne,
  • Et travailler à construire une Europe porteuse d’avenir, pas une usine à gaz de plus (nous avons déjà l’ONU).

J’ai 39 ans, je suis marié et j’ai 5 enfants. Mon pays me manque autant qu’il me désespère. Je ne suis pas le seul. Saurez-vous nous convaincre qu’il est temps de rentrer pour participer à la construction d’une France moderne, dans une Europe amie des Etats-Unis d’Amérique, forte de ses complémentarités et non d’une uniformité artificielle imposée par des idéologues ?

Stéphane de Saint Albin

[1] J’utilise à dessein le terme de représentants et non pas celui de dirigeants. La différence étant que pour diriger, il faut susciter l’adhésion, la confiance et l’enthousiasme qui conduisent au dépassement de soi.