10 février 2002

Suggestion aux autres (et nombreux) candidats de droite

Le Che, non pas le Chi, contre Jospin ?

La semaine passée a vu la poursuite de la progression de Chevènement dans les sondages. Le triple démissionnaire de la République semble désormais le mieux placé pour incarner le troisième homme de l’élection présidentielle. Il faut toujours se méfier des sondages, en particulier à trois mois de l’échéance et alors que les deux candidats principaux ne sont pas encore entrés en campagne. Certains oiseaux de mauvais augures nous présentent un 2ème tour Chevènement-Jospin comme une réelle possibilité. Herve de Charrette a raison de sonner le tocsin, mais que nous propose-t-il pour éviter une telle catastrophe ? Pas grand-chose malheureusement, même pas de voter pour le candidat du parti dont il est le Président délégué ! Pauvre Bayrou… si même dans son camp il n’arrive pas à convaincre, comment peut-il espérer convaincre la majorité des Français ?

Chirac baisse dans les sondages, en particulier depuis l’annonce du retour – providentiel pour la gauche et par conséquent suspect – de Schuller en métropole. Que l’affaire sulfureuse du financement du RPR refasse ainsi surface a fait perdre leur sang froid aux amis du « Président-bientôt-candidat-mais-c’est-lui-qui-decide-quand-il-le-dira ». Je remarque au passage que l’on prépare l’opinion, par sacro-saints sondages interposés, au retour aux commandes de l’ineffable « Juppé-droit-dans-ses-bottes ». Incroyable… S’ajoute a cela la négation encore plus inouïe des rencontres avec Le Pen en 1995. Chirac vient malencontreusement de laisser entrevoir aux Français qu’il les prend pour des imbéciles ! Il est urgent qu’il se reprenne, au risque de donner raison a Monsieur de Charrette.

La montée dans les sondages de Jospin et Chevènement est une aubaine pour la bande a Chichi. Elle va leur permettre, dans les semaines a venir, de faire du Président sortant l’homme providentiel dont la France a besoin, le seul vraiment capable de nous éviter une autre décennie gauchiste, etc. Voire… S’il est réélu, ce qui est loin d’être gagné, comment être certain que Chirac ne fera pas une politique de gauche, ou ne facilitera pas le retour de la gauche au pouvoir ? Loin de tout esprit polémique, je crois la question légitime. Comme a dit en substance Christine Boutin récemment : le problème avec Chirac s’est qu’on ne sait pas très bien ou il nous emmène, et qu’on se demande même s’il le sait lui-même.

Un troisième homme, un vrai

Il me parait donc stratégiquement important qu’émerge un « troisième homme » a droite, un candidat capable de se positionner en alternative à la fois à Jospin, Chevènement et Chirac. Mais qui ?

Bayrou et Madelin, pourtant portés par deux formations politiques importantes à l’Assemblée, ne me semblent pas en mesure de jouer ce rôle. Bayrou pour les raisons évoquées plus haut. Madelin parce que son discours libéral est trop radical, il fait peur. En se présentant tous les deux, ces ténors de l’ex-UDF giscardienne se neutralisent l’un et l’autre.

Malgré la sympathie que je leur porte, je ne crois pas que Christine Boutin et Philippe de Villiers puissent espérer rassembler largement les déçus du chiraquisme qui veulent croire qu’il est encore possible de rompre avec le socialisme. Problème d’image…

La bonhomie provençale de Pasqua nous l’a rendu longtemps sympathique, mais je ne suis pas sur que beaucoup de Français oseront faire confiance a quelqu’un dont l’honnêteté est si contestée.

Restent Le Pen et Maigret, qui eux aussi se neutralisent mutuellement. Marqués « danger, extrêmistes » grâce à l’ostracisme de la droite depuis 1981, ils sont peu crédibles en rassembleurs des candidats et électeurs de droite qui renâclent à signer un deuxième cheque en blanc à Chirac, ou comme gouvernants.

Certains regrettent sans doute Balladur, mais l’intéressé, qui a appris sa leçon il y a 7 ans, soutien publiquement désormais son « ami » de 20 ans. D’autres, j’en suis sur, se disent que VGE n’est pas si vieux… mais restons sérieux.

Si je fais l’impasse sur Saint Josse (j’ai appris son existence la semaine dernière…), il reste Christian Blanc. Je ne le connais pas très bien, comme la plupart j’imagine, mais il a plusieurs caractéristiques qui me semblent intéressantes :
  1. il est nouveau dans le paysage politique, mais pas tout a fait inconnu du public ;
  2. ce n’est pas un professionnel de la politique, donc difficilement soupçonnable de se présenter pour préserver je ne sais quel avantage (comme l’immunité…) ;
  3. il a l’expérience du terrain, le réalisme du chef d’entreprise et des qualités indéniables de leadership ;
  4. son discours est compatible dans les grandes lignes avec ceux des candidats évoqués il y a un instant.

Message aux candidats de droite

Blanc ferait un Premier Ministre idéal pour un Président décidé à remettre la France sur les rails de la modernité. La conduite des affaires de l’Etat, et notamment sa réforme, est une tache toute trouvée pour cet entrepreneur prêt à relever les défis les plus audacieux. En l’occurrence néanmoins, je pense qu’il serait souhaitable que Christian Blanc se présente à la Présidence de la République. Et je suggère qu’il le fasse avec le soutien de la plupart des « autres » candidats de droite. Je lance donc un appel a Madame Boutin, Messieurs Bayrou, Madelin, Villiers, Pasqua, Maigret et Le Pen, afin qu’ils retirent leur candidature et fassent campagne pour soutenir celle de Christian Blanc. Pour que les Français aient vraiment le choix. Pour sortir la France de cette situation ubuesque.

Choquant ? Bien sur… et même difficile a avaler pour les candidats en question. Mais pas forcement idiot. Malgré des différences, les programmes de ces messieurs et de cette dame sont loin d’être incompatibles. Même sur la question de l’Europe, je suis sur qu’il y a moyen de trouver un terrain d’entente, de fixer des objectifs et une stratégie qui satisfasse tout le monde, si l’on est prêt toutefois a regarder la réalité en face et a dépasser le niveau de la rhétorique. Sur l’Europe comme sur le reste, c’est le bon sens qui doit l’emporter, et qui l’emportera a terme. On en reparlera peut être.

Vous pensez ces candidats trop différents, trop éloignés les uns des autres ? Regardez les ralliés à Chevènement… une vraie auberge espagnole. Dans le cas présent, il s’agit de candidats de droite, qui devraient partager plus facilement un certain nombre de valeurs communes que les radicaux, trostkistes et anciens conseillers de Pasqua qui forment l’escorte du « Che ».

Vous pensez que la plupart sont trop ambitieux pour renoncer à tenter leur propre chance ? C’est possible, mais au rythme ou vont les choses, la plupart finiront avec une ardoise de campagne non remboursée par l’Etat, n’auront pas gagné grand-chose au passage, voire auront ruiné leur avenir politique. J’ose espérer que certains d’entre eux, s’il ne l’ont pas déjà fait, réfléchiront à cette éventualité et auront suffisamment d’abnégation et le sens du service public pour envisager sérieusement une telle démarche.

Encore une fois, je ne connais pas grand-chose de Christian Blanc. Aussi, ma proposition apparaîtra-t-elle sans doute incongrue a ceux d’entre vous qui sont mieux informés que moi. Si vous pensez un autre candidat capable de porter le flambeau de l’alternative à l’immobilisme et de rassembler les candidats et électeurs de droite qui ont mal avalé le septennat Chirac, n’hésitez pas…

Stéphane

3 février 2002

Pourquoi et pour qui voter ?

A l’étranger depuis 3 ans presque jour pour jour, je regarde la France « avec amour et irritation », selon une formule empruntée a Christian Blanc. Je suis frappé chaque été, ou lorsque je parcours l’actualité française sur Internet, de voir à quel point mon pays semble se complaire dans l’immobilisme, alors que les défis s’accumulent et que le monde change a toute vitesse.

La France au début du 21eme siècle

La France est devenu l’archétype du pays socialiste. Deux caractéristiques me sautent aux yeux :

  • 25% de la population active travaille d’une manière ou l’autre pour l’Etat, et la dette publique a atteint des niveaux historiques (lire à ce sujet le livre de Serge Dassault, « Un Projet pour la France ») ;
  • Les Français s’installent dans la dépendance étatique et la revendication corporatiste. Une minorité de syndicalistes « terrorisent » littéralement le pays sans que le pouvoir politique, par complaisance idéologique, calcul électoraliste ou impuissance, ne lève le petit doigt.

Pendant que l’Etat s’occupe de créer des emplois-jeunes, de faire la vie encore plus dure aux entreprises et de réglementer les aspects les plus intimes de la vie des Français, il échoue à préserver les droits fondamentaux des citoyens. Son autorité est bafouée quotidiennement dans les banlieues ainsi qu’en Corse, ou les assassins du Préfet Erignac courent toujours. Lorsque des militaires en sont réduits à manifester dans la rue pour se faire entendre de leur employeur, c’est que l‘Etat est à la masse, que le système n’est pas loin d’imploser.

Pendant que nous nous empêtrons dans nos débats idéologiques dépassés et achevons de ne pas préparer l’avenir, nos voisins continuent à prospérer. Comment s’étonner que les forces vives de la nation, jeunes diplômés et entreprises, cherchent et trouvent à l’étranger un environnement plus favorable ?

Le pire est que nos dirigeants successifs, qu’ils soient de gauche ou de droite, ne semblent pas prendre la mesure de cette spirale du déclin dans lequel ils ont laissé le pays s’enfoncer. Leurs agitations médiatiques ont quelque chose de désuet, de surréaliste. Refusant de voir la réalité en face, nombre d’entre eux évoquent comme s’il s’agissait d’une incantation magique la fameuse « exception française », un terme qui fait bien rire à l’étranger.

Vue d’Amérique, la France n’a jamais été un allié « facile », en particulier du temps du Général de Gaulle. Il est frappant de remarquer à quel point les Américains ne respectent plus et ne comptent plus sur la France, alors que le soutien des autres nations occidentales a revêtu une importance primordiale pour eux depuis le 11 Septembre. Tony Blair a mis a profit les événements récents pour achever d’enraciner l’idée chez les Américains que « l’Europe, c’est l’Angleterre ». La France n’a fait que se ridiculiser ces derniers mois sur la scène internationale. Les efforts de relations publiques de Chirac à New York ont été annihilés peu de temps après par l’épisode des Marsouins en Ouzbékistan. Pour les Etats-Unis, la France n’est pas un partenaire fiable. Ils semblent se demander : combien de temps devrons nous encore composer au Conseil de Sécurité de l’ONU et ailleurs, avec cette ex-puissance coloniale sur le déclin, toujours aussi arrogante malgré son incapacité a régler ses propres problèmes ?

2002, une année décisive

Tout ceci serait bien déprimant, si on s’arrêtait la. Mais la France millénaire a connu des périodes autrement plus noires. Nous avons beaucoup d’atouts, il ne nous manque que la volonté de nous sortir de ce bourbier. Le déclin de notre pays n’est pas inéluctable. Si la plupart de nos hommes politiques semblent avoir démissionnés, ce n’est pas une raison pour que le peuple Français jette l’éponge. Nous n’avons qu’à changer de représentants.

Bien entendu, la plupart vont s’accrocher au pouvoir comme les poux à la barbe d’un taliban au pire moment des bombardements américains sur Kandahar. Mais les élections présidentielles et législatives à venir nous fournissent une belle occasion de reprendre les choses en main. Ne laissons pas la caste des énarques nous confisquer ces élections, seul moment ou ceux qui nous gouvernent sont un tant soit peu a la merci de la volonté du peuple (car le reste du temps, ils font bien ce qu’ils veulent…).

Pour qui voter ?

Les medias nous prédisent, et s’est fort probable, un duel Chirac-Jospin au deuxième tour de la Présidentielle. La tentation est grande pour ceux qui souhaitent encore et toujours la rupture avec le socialisme et s’estiment trahis par Chirac, de se désintéresser purement et simplement de cette élection. Ce serait une grave erreur. Si Chirac est celui qui, a droite, a probablement le plus de chances de franchir le cap du 1er tour, il ne sera pas élu sans donner de sérieuses garanties a la majorité qui l’a élu en 1995, que son quinquennat ne tournera pas au fiasco contre-productif que fut son septennat.

Alors, pour qui voter au premier tour ?

Certainement pas pour les idéologues archi-conservateurs que sont a gauche Jospin, Hue, Laguiller et compagnie. Héritiers plus ou moins officiels du trotskisme et du marxisme-léninisme, ces gens-la refusent obstinément de voir la réalité en face. On dirait qu’ils vivent dans une sorte de quatrième dimension, ou il leur suffit d’affirmer que tout va bien pour que les problèmes (le chômage, l’insécurité, etc.) se résolvent d’eux même. Leur seule ambition pour la France est le fonctionnariat, leur stratégie la redistribution par l’Etat socialiste bienveillant d’une richesse forcement décroissante. Jospin, Aubry, Guigou et leurs copains furent à mon sens les pires de tous les socialistes au pouvoir depuis 1981.

Il y a-t-il du bon dans le reste de la gauche « plurielle » ? Il faut bien reconnaître que DSK et Fabius, convertis aux valeurs du libéralisme économique, ont, d’une certaine manière, limités les dégâts depuis 1997. Mais ces bourgeois de gauche ne sont que des opportunistes. Ils ont été complices de l’entreprise jospinienne et ne méritent pas qu’on leur fasse confiance.

Que penser de Noël Mamère, qui a affirmé la semaine dernière qu’il est "bien entendu" favorable au mariage entre homosexuels et à l'adoption pour les couples homosexuels, si ce n’est que « nous n’avons pas les mêmes valeurs » ?

Parlons un peu de Chevènement. Malgré ses accents gaulliens et le succès de ses débauchages a droite, l’homme reste fondamentalement de gauche. Même si ces critiques contre Jorac-Chispin sont bien senties (et méritées), je ne suis pas convaincu qu’il fera autre chose que de continuer la politique de contrôle étatique que nous subissons sous divers gouvernements depuis 20 ans. Je vous fiche mon billet qu’il appellera à voter Jospin contre Chirac au deuxième tour.

Rien à gauche donc, non pas que cela nous surprenne, mais il fallait bien y jeter un coup d’œil, comme au moment de traverser la route. Voyons voir maintenant ce que nous propose la droite.

A droite, c’est le boxon !

Apres la déroute de 1997, on aurait pu penser que RPR, UDF et autres DL entreprendraient un sérieux effort de réflexion et de refondation, les amenant a rompre franchement avec les égarements idéologiques issus de 68 et a redécouvrir leurs valeurs propres, qui furent a l’origine de leur soutien populaire d’antan. Je n’ai honnêtement pas l’impression que cet effort ait été entrepris et que les grands partis de droite puissent dessiner un projet de société ambitieux capable de plaire à la majorité des Français. Je reviendrai sur la question des valeurs une autre fois.

Apres quelques hésitations, le RPR est rentré dans le rang, ses dirigeants opportunistes sont tous désormais le petit doigt sur la couture du pantalon derrière Chirac. Forts de leurs positions de partis du Président, le RPR et l’Union en Mouvement (en fait une émanation du RPR), ont relégué UDF et DL au rang de secte politique, oblitérant tout débat au sein de l’opposition.

Le résultat ? Une foison de candidatures : Bayrou, Madelin, Pasqua, Maigret, Le Pen, Boutin, de Villiers ou encore Blanc, bien que les deux derniers ne se soient pas officiellement déclarés a ce jour. On ne m’en voudra pas je l’espère de ne pas céder a la mode du politiquement correct en ne listant pas séparément les noms des candidats du FN et du MNR…

Ca en fait du monde. Trop de candidatures jouent en faveur du « candidat souhaitable » Chirac. Aucun de ces candidats ne peut espérer faire un score suffisant au premier tour. A moins de s’entendre, de mettre de cote les ambitions et stratégies personnelles pour présenter des projets crédibles, ce qui ne devrait pas être très difficile. Je vous livrerai quelques unes de mes idées dans ce domaine une prochaine fois.

Stéphane